Droit de se clore, clôture et droit de passage

L'hypothèse est la suivante (elle est assez fréquente) : un droit de passage a été institué par la création d'une servitude sur le terrain d'un propriétaire est ce propriétaire entend cependant se prévaloir de son droit de clore et veut poser une porte, une chaîne, un portail qui par sa nature rendra évidemment l'exercice de la servitude de passage plus difficile.

Comment concilier le droit de se clore avec le droit de passage existant ?

Tout est cas d'espèce.

Voici certaines décisions qui admettent cet obstacle relatif à l'utilisation de la servitude et d'autres décisions qui ne l'admettent pas.

« Attendu qu'ayant retenu qu'il ne saurait être contesté aux époux X... le droit de se clore, la cour d'appel, pour débouter Mme Y... de son action possessoire, a souverainement relevé qu'elle pouvait aisément franchir la clôture en décrochant puis en raccrochant la chaîne tendue entre les deux fûts et qu'un passage pour piétons demeurait constamment libre sur la droite de la cour. »

« Attendu que le propriétaire d'un fonds grevé d'une servitude de passage conservant le droit de se clore, sauf à ne rien entreprendre qui puisse diminuer l'usage de celle-ci ou le rendre plus incommode, la cour d'appel, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des circonstances modificatives de cet usage, a légalement justifié sa décision en retenant, sans modifier l'objet du litige, que l'installation du portail litigieux sur l'assiette de la servitude, large de six mètres, en retrait de trois mètres de la voie publique, et s'accompagnant de la pose par les consorts Z..., à l'entrée du passage, d'une boîte à lettres au nom de M. X..., n'entraînait pour celui-ci aucune gêne. »

« Attendu qu'après avoir rappelé que le propriétaire du fonds grevé d'une servitude de passage conserve le droit de se clore dès lors qu'il laisse au passage la largeur nécessaire à l'exercice de la servitude et qu'il remet au propriétaire du fonds dominant une clé du portail, l'arrêt constate, d'une part, qu'il n'est pas démontré que la largeur du passage ait été diminuée et, d'autre part, que les consorts X... ont fait offre d'une clé du portail aux époux Y... qui l'ont refusée ; que par ces seuls motifs dont elle a souverainement déduit que l'usage de la servitude n'avait pas été rendue plus incommode, la Cour d'appel qui n'avait pas à se livrer à une recherche qui ne lui était pas demandée, a légalement justifié sa décision. »

ATTENDU, SELON L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE (MONTPELLIER, 15 DECEMBRE 1978), QUE PIERRE X... ACCEDE A SA PROPRIETE EN UTILISANT UN CHEMIN APPARTENANT AUX EPOUX FRANCOIS DELONCA, ET GREVE AU PROFIT DE SON FONDS D'UNE SERVITUDE DE PASSAGE; QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET STATUANT SUR L'ACTION EN COMPLAINTE FORMEE PAR PIERRE X..., D'AVOIR CONDAMNE LES EPOUX X... A ENLEVER LA CHAINE CADENASSEE FIXEE PAR EUX A L'ENTREE DU PASSAGE, ALORS, SELON LE MOYEN, < QUE TOUT PROPRIETAIRE AYANT LE DROIT DE CLORE, LA CONSTITUTION D'UNE SERVITUDE DE PASSAGE N'IMPLIQUE PAS, PAR ELLE-MEME, PROHIBITION POUR LE PROPRIETAIRE DU FONDS SERVANT DE FERMER SUR LA VOIE PUBLIQUE, A L'AIDE D'UNE CHAINE, LA PARTIE DE SA PROPRIETE GREVEE DE LA SERVITUDE, S'IL EN REMET UNE CLEF AU PROPRIETAIRE DU FONDS DOMINANT >; MAIS ATTENDU QUE L'ARRET ENONCE JUSTEMENT QUE LE PROPRIETAIRE D'UN FONDS Y... D'UNE SERVITUDE DE PASSAGE NE CONSERVE LE DROIT DE SE CLORE QU'A LA CONDITION DE NE PAS PORTER ATTEINTE AU DROIT DE PASSAGE ET DE NE PAS EN RENDRE L'EXERCICE PLUS INCOMMODE; QUE LES JUGES DU FONDS ONT SOUVERAINEMENT RETENU QUE LA POSE D'UNE CHAINE CADENASSEE A L'ENTREE DU CHEMIN ET A PLUSIEURS METRES DE L'IMMEUBLE, NECESSITANT UN DEPLACEMENT AUSSI SOUVENT QU'UNE PERSONNE OU UN VEHICULE ACCEDAIT A LA PROPRIETE DE PIERRE X..., CONSTITUAIT UN TROUBLE POSSESSOIRE RENDANT L'EXERCICE DE LA SERVITUDE PLUS DIFFICILE; D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE. »

« ATTENDU QUE LES EPOUX X..., AYANT FERME PAR LA POSE D'UN PORTAIL LE CHEMIN, DONNANT ACCES A LA VOIE PUBLIQUE, SUR LEQUEL ROCHARD A UNE SERVITUDE DE PASSAGE A PIED ET AVEC CHARRETTE, L'ARRET ATTAQUE SUR L'ACTION POSSESSOIRE DE CELUI-CI, LES A CONDAMNES A ENLEVER CE PORTAIL ; ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A LA COUR D'APPEL D'AVOIR AINSI STATUE SANS REPONDRE AUX CONCLUSIONS DES EPOUX GANGNEUX QUI SOUTENAIENT QUE ROCHARD "NE POUVAIT SE PLAINDRE D'AUCUNE GENE APPRECIABLE" POUR LA FACILITE DE LA CIRCULATION A PIED OU AVEC CHARETTE DES LORS QU'UNE CLEF DU PORTAIL LUI AVAIT ETE REMISE ET QUE LEDIT PORTAIL SE SUBSTITUAIT A UN PORTAIL PREEXISTANT TOMBE EN RUINE" ;

MAIS ATTENDU QUE, SI LE PROPRIETAIRE D'UN FONDS Y... D'UNE SERVITUDE DE PASSAGE CONSERVE LE DROIT D'Y FAIRE TOUS TRAVAUX QU'IL JUGE CONVENABLES ET DE SE CLORE, IL NE DOIT CEPENDANT RIEN ENTREPRENDRE QUI PUISSE DIMINUER L'USAGE DE LA SERVITUDE OU LE RENDRE MOINS COMMODE, L'APPRECIATION DES CIRCONSTANCES MODIFICATIVES DE CET USAGE RENTRANT DANS LES POUVOIRS SOUVERAINS DES JUGES DU FOND ;

ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL RELEVE QUE LES EPOUX GANGNEUX ONT REDUIT LA LARGEUR DU PASSAGE, QUI N'EST PLUS QUE DE 3,38 M, ALORS QU'IL DOIT ETRE DE 4 METRES, ET DECLARE QUE LE TROUBLE AINSI APPORTE A L'EXERCICE DU PASSAGE NE PEUT ETRE UTILEMENT CONTESTE PUISQUE CE PASSAGE EST LE SEUL ACCES PERMETTANT A ROCHARD D'EXPLOITER SA FERME. »