10. Plan séance 31/05/2016

PHILOPOP- 31-05-2016- Réflexions sur la tolérance

Cette séance est consacrée à une lecture du Traité théologico-politique de Spinoza (TTP, pour faire plus court), publiée anonymement en 1670. Il n’est pas certain que, dans les limites de temps de la séance, nous puissions développer la 3ème partie de notre propos. Il me paraît utile d’apporter un éclairage historique sur l’œuvre.

Introduction :

Spinoza (1632-1677) : une existence confrontée au problème de l’intolérance. Quelques repères biographiques et historiques utiles : l’expulsion des Juifs d’Espagne et du Portugal au XVIème siècle ; les Provinces-Unies au XVIIème siècle : une terre d’accueil prospère et ouverte au monde ; l’éloge de la République d’Amsterdam par Spinoza (préface et chapitre 20 du TTP).

Toutefois, il s’agit là d’une tolérance fragile et menacée : d’où les raisons de la rédaction du TTP (Lettre à Oldenburg, 1665) ; voir aussi le sous-titre éclairant du TTP. Spinoza vise à libérer ses lecteurs des « préjugés des théologiens ».

    1. Les causes et les conséquences de l’intolérance religieuse

a/ Le spectacle de la dénaturation de la religion (préface) ; la transformation de l’Ecriture sainte en instrument de haine et de discorde (début du chapitre 7).

b/ Les causes de l’intolérance : « l’ambition et l’avidité sordides » des théologiens qui ont besoin de la superstition des hommes, afin de faire passer leurs « inventions » pour la parole divine, et exercer ainsi un pouvoir sur les consciences.

c/ D’où une lecture « délirante » de la Bible qui exclut la raison : elle apparaît comme une lettre adressée directement par Dieu aux hommes, devant la vérité de laquelle chacun doit s’incliner (chapitre 7).

d/ La superstition est le moyen le plus efficace dont disposent les Etats despotiques, pour gouverner la multitude (et anéantir toute liberté de penser). Voir la préface.

    1. Elaborer une vraie méthode d’interprétation de l’Ecriture pour en dégager le sens, saisir la vraie nature de la foi, et libérer les esprits de la tutelle des théologiens

a/ La Bible n’est pas un traité savant destiné à enseigner la vérité sur la nature de Dieu et des choses : les prophètes sont des hommes doués d’une vive imagination qui s’imposent aux autres hommes par leurs qualités morales. L’exemple de l’ignorance de Josué (chapitres 1, 2 et 6).

b/ Il faut interpréter l’Ecriture comme le physicien étudie la nature, pour en dégager rationnellement le véritable sens. Distinguer le « sens d’un discours » de la « vérité des choses ». L’exemple de l’interprétation des paroles de Moïse : « Dieu est un feu, Dieu est jaloux » (chapitre 7)

c/ Le message principal de l’Ecriture est partout le même : Dieu commande aux hommes de pratiquer la justice et la charité.

d/ Les leçons de l’Ecriture : la foi et la raison n’ont pas le même objet (l’obéissance à Dieu/ la vérité) et sont donc deux domaines radicalement distincts. C’est de leur confusion que résultent l’intolérance et le fanatisme. La religion ne devient intolérante que lorsqu’elle sort des limites de sa fonction morale, quand elle prétend détenir la vérité et cherche à l’imposer en régissant la vie sociale

    1. La liberté de penser est nécessaire à l’Etat (chapitre 20)

a/ « Personne ne peut renoncer à la liberté de juger et d’opiner comme il veut » ; cette liberté procède du droit naturel qui constitue chaque individu.

b/ Pour former l’Etat, l’individu renonce « à son droit d’agir suivant le seul décret de sa pensée » au profit du souverain (par le « pacte social », celui-ci seul peut agir publiquement et décider des lois qui permettent d’assurer la paix civile), mais il ne renonce pas au droit de raisonner et de juger. Il faut ici distinguer les actes (seuls punissables quand ils transgressent les lois) et les paroles (qui peuvent les critiquer).

c/ Si l’Etat doit délimiter la sphère d’action des religions, il ne légifère pas sur les opinions et les croyances (qui relèvent du domaine privé des choix individuels)

d/ Des lois qui répriment des opinions sont à la fois inutiles et dangereuses pour l’Etat. L’Etat est d’autant plus fort (= démocratie) qu’il s’appuie sur la liberté de penser des individus pour se conserver