Les pensées de Pascal 29/09/2016

Séance du 29-09-2016- Lecture des Pensées de Pascal

Cette 1ère séance consacrée aux Pensées de Pascal prolongera en partie la réflexion générale sur le bonheur de la séance du 15-09, dans la mesure où Pascal place cette question au centre de ses Pensées. Ce sera aussi l’occasion de confronter son analyse à celle d’Aristote, que nous avons abordée partiellement et rapidement le 15-09. Etant donné les limites de temps de la séance, je me vois obligé de faire une présentation très écourtée de Pascal et de son œuvre (éventuellement nous y reviendrons). Sur ce point notamment, je conseille la lecture du livre très clair et très instructif d’E. Carsin : « Pascal, pas à pas » chez Ellipses. Enfin, je vous conseille à nouveau de vous procurer les Pensées de Pascal dans l’édition Le Guern, chez Folio. C’est à elle que je fais référence.

Introduction

Pour cerner le plan des Pensées, il faut regarder la table des matières p-68, et lire les fragments 4 et 10. Pascal va montrer d’abord à l’homme la misère de sa condition (dont témoigne le caractère illusoire et dérisoire de sa recherche du bonheur) pour le conduire à voir où est sa vraie grandeur et son véritable bien.

Le problème est le suivant : pourquoi (selon Pascal) le bonheur que recherchent tous les hommes, est-il inaccessible ? Comment expliquer qu’ils ne puissent l’atteindre ?

    1. Le bonheur n’est pas une fin naturelle que la raison peut déterminer en se fondant sur la connaissance de l’homme

      1. a- Rappel de l’analyse d’Aristote au livre I de l’Ethique à Nicomaque :

      2. - L’homme heureux est celui qui remplit bien sa « fonction » d’homme ;

      3. - Le bonheur est une fin prescrite par la nature à l’homme ; la réflexion sur le bonheur est inséparable de la considération du « cosmos ».

      4. b- La rupture de Pascal avec les philosophes qui prétendent connaître l’homme et fonder sur cette connaissance le vrai bonheur humain :

      5. - Le bonheur ne peut plus être considéré comme une fin prescrite à l’homme par la nature : la destruction de l’idée de cosmos par la révolution galiléenne qui lui substitue l’idée d’un univers infini (fragment 185 : « Disproportion de l’homme »).

      6. - La double nature de l’homme, le « péché originel » d’Adam : l’homme est un être déchu, « un roi dépossédé » (fragments 139 et 107) : « Il y a eu autrefois dans l’homme un véritable bonheur, dont il ne lui reste maintenant que la marque et la trace toute vide » (fragment 138).

      7. - L’homme est un « mystère » que la raison ne peut connaître et que seule la religion chrétienne peut éclairer (fragment 122).

    2. La recherche du bonheur témoigne de la nature contradictoire (« contrariétés ») de l’homme

      1. a-« L’homme passe infiniment l’homme » (fragment 122) : l’idée que l’homme a du bonheur exprime une aspiration à l’infini qui ne peut trouver satisfaction dans aucun objet fini (« ce gouffre infini ne peut être rempli que par un objet infini et immuable, c'est-à-dire que par Dieu même », fragment 138).

      2. b- En l’absence d’un souverain bien humain (et à défaut d’identifier Dieu comme le véritable souverain bien), la recherche d’un bonheur seulement humain ne peut être qu’une course illusoire et absurde : n’importe quelle chose peut momentanément jouer le rôle du souverain bien aux yeux de l’imagination humaine (fragment 138).

    1. La course au bonheur : le « divertissement » (« On aime mieux la chasse que la prise », note du fragment 126)

      1. a- L’« ennui » comme raison profonde de l’agitation des hommes (fragment 74)

      2. b- La nature contradictoire de l’homme (la conjugaison de deux « instincts secrets et contraires ») permet d’expliquer le « divertissement » par lequel on « tend au repose par l’agitation » (fragment 126).

      3. c- La nécessité du divertissement (« les détourner de penser à soi ») : sa fonction unique et universelle rend commensurables entre elles des activités aussi diverses que le jeu, la chasse, l’exercice du pouvoir, le travail du laboureur….

      4. d- La « sottise » des philosophes (exemple des Stoïciens) : en dénonçant le divertissement, ils prétendent être au dessus de la mêlée, mais ils n’y échappent pas plus que les autres hommes. En les exhortant à « rentrer en eux-mêmes », ils ne comprennent pas pourquoi il est inévitable que les hommes cherchent leur bonheur « hors d’eux-mêmes » (fragments 133 et 386). « Le bonheur n’est ni hors de nous ni dans nous ; il est en Dieu et hors et dans nous » (fragment 386).