TP3
Etude spectroscopique
des complexes
Etude spectroscopique
des complexes
ÉTUDE SPECTROSCOPIQUE DES COMPLEXES
I. GÉNÉRALITÉS
Un complexe contient un ou plusieurs atomes centraux M qui sont coordonnés par les ligands L (atomes, molécules ou ions). Tous les éléments de transition forment facilement des composés de coordination ou des complexes.
La grande variété des complexes existants est causée par la variabilité du nombre de liaisons métal-ligands formées par l'atome central, c'est-à-dire par la coordinence qui conditionne la géométrie des espèces formées. Les coordinences les plus courantes sont 4 et 6.
Pour expliquer la nature des liaisons dans les complexes on a élaboré plusieurs modèles. Un modèle simple qui permet d'interpréter correctement la formation des liaisons dans les complexes et leurs propriétés est le modèle de la théorie du champ cristallin. Ce modèle utilise seulement les interactions de type électrostatique (loi de Coulomb).
Ce modèle suppose que les ligands soient représentés par des charges ponctuelles négatives, lorsqu'elles sont placées autour de l'atome central, elles forment un champ électrostatique dont l’action modifie l'énergie des orbitales atomiques d.
Un élément de transition d possède à l’état d’ion libre 5 types d’orbitales dxy, dyz, dxz, dx2-y2 et dz2 qui sont dégénérées. Ces orbitales atomiques d non perturbées présentent une dégénérescence de 5.
Si on les place dans un champ sphérique, l'énergie des orbitales d sera plus élevée, mais la dégénérescence ne sera pas diminuée. Lorsque les orbitales d seront dans un champ de symétrie octaédrique, on observe une levée de dégénérescence, trois orbitales d seront stabilisées, les deux autres déstabilisées. La stabilisation des orbitales d dépend de leur forme et leur orientation. Les orbitales dx2-y2 et dz2 ont leurs lobes orientés vers les ligands, leur niveau énergétique va monter (répulsion). Les trois orbitales dxy, dxz, dyz, ont leurs lobes orientés vers les directions diagonales entre les ligands (moins de répulsion).
Orbitales d non perturbées Levée de dégénérescence partielle
L'écart énergétique Do (énergie de dédoublement des orbitales d) sépare les orbitales t2g et eg. Les orbitales t2g abaissent leur énergie, elles seront plus stables et la stabilisation correspond à -2/5 Do par électron. Par contre, l'énergie des orbitales eg va monter, la déstabilisation va correspondre à +3/5
Do par électron.
II. TRANSITION ÉLECTRONIQUE DANS LES COMPLEXES (Modèle simple)
Les propriétés d’un ion de transition dépendent étroitement de la nature et de la symétrie du champ cristallin dans lequel il se trouve. La dégénérescence des niveaux électroniques éclate sous l’effet des différentes interactions auxquelles est soumis l’ion.
On se limite au modèle simple qui ne fait intervenir que les interactions électroniques :
Les attractions électron-noyau conduisent aux « configurations » dn ou fn dont la séparation en énergie et de l’ordre de 105 cm-1.
Les répulsions des électrons entre eux et avec les ligands font éclater ces configurations en « termes » (séparation 104 cm-1).
Les éléments de transition peuvent absorber les ondes électromagnétiques dans le domaine visible (400 – 840 nm) et passer d'un état fondamental à un état excité. La différence entre les deux niveaux énergétiques correspond à l'absorption d'un photon avec l’énergie : DE = hn = hc/l
Si le composé absorbe à une certaine longueur d'onde, la couleur perçue sera donc complémentaire du domaine absorbé (voir disque des couleurs). La transition électronique peut être schématisée sur la figure suivante :
Disque des couleurs DE = hn = Y2 - Y1 = Do
Il est possible d’expliquer l'origine de la couleur des complexes des éléments de transition avec la configuration électronique d1 à d9 sur la base du dédoublement des orbitales d. On considère que l'absorption d'un photon correspond à une transition entre deux niveaux énergétiques Y1 et Y2. Ces niveaux sont associés aux différentes configurations électroniques pour une symétrie donnée. Il faut donc pouvoir déterminer les niveaux énergétiques possibles provenant d’une configuration électronique. Le cas le plus simple est celui de la configuration d1 (ou d9) pour laquelle on observe une seule bande d’absorption dans le spectre visible ; c’est le cas des complexes de Ti3+ et de Cu2+. Dans le cas des configurations électroniques avec plusieurs électrons d, on observe une ou trois bandes d'absorption. Pour expliquer correctement les spectres observés, il est nécessaire d'utiliser le concept des termes spectroscopiques (semestre 5 et semestre 6).
• Configuration d1 : [Ti(H2O)6]3+
L'état fondamental pour le cation Ti3+ indique qu’il y a un seul électron dans les orbitales d, la configuration électronique de l'état fondamental est (t2g)1(eg)0, la transition due à l'absorption d'un photon est associée au passage d'un électron de l'orbitale t2g à l'orbitale eg, la configuration de l'état excité est alors (t2g)0(eg)1.
(t2g)1 (eg)0 ® (t2g)0 (eg)1
La différence énergétique entre l'état fondamental et l'état excité correspond à la différence énergétique entre les orbitales notée Do. A ceci correspond une absorption d’énergie : Do = DE = hn.
La mesure de u (ou de la longueur d’onde l) correspondant au maximum d’absorption permet de connaître la valeur de Do.
La couleur de ce complexe est violette et dans le spectre on voit une seule bande d'absorption avec le maximum situé vers 490 nm. Ce maximum correspond à une différence énergétique 243 kJ.mol-1 ou 2,48 eV.
• Configuration d9 : [Cu(H2O)6]2+
Le cation Cu2+(aq) a neuf électrons dans sa sous-couche d, donc sa configuration électronique est (t2g)6 (eg)3, cette configuration peut être discutée aussi du point de vue complémentaire avec un trou positif dans la sous-couche 3d. La transition de l’électron est étudiée de la même façon que le cation Ti3+.
La transition électronique est associée à la promotion d'un électron de l'orbitale t2g vers l'orbitale eg : (t2g)6 (eg)3 → (t2g)5 (eg)4
Dans le spectre on observe une seule bande d'absorption vers 700 nm.
Remarque : En négligeant l’effet Jahn-Teller qui sera expliqué plus tard on observe une seule bande qui permet de calculer la valeur de Do.
Si on ajoute dans la solution aqueuse un excès d’ammoniaque (solution aqueuse d’ammoniac) :
[Cu(H2O)6]2+ + NH4OH (excès) → [Cu(H2O)2(NH3)4]2+
ou → [Cu(NH3)4]2+ (carré plan car les deux ligands sur l'axe Oz sont rejetés à l'infini).
Complexe [(Cu(H2O)2(NH3)4]2+ ou [(Cu(NH3)4]2+
La réaction de substitution se manifeste par un changement de la coloration du bleu clair vers le bleu-violet foncé. Le maximum de la bande d'absorption se déplace vers 600 nm. La comparaison des deux valeurs de Do montre que :
Do(H2O) < Do(NH3)
Cette expérience montre que les différents ligands ont des aptitudes différentes de dédoubler les niveaux énergétiques ; donc il est possible de faire un classement des ligands appelé série spectrochimique :
I- < Br- < Cl- < F- < OH- < H2O < SCN- < NH3 < en < bipy < o-phen < NO2- < CN-
Les ligands placés à gauche sont les ligands à champ faible et les ligands dans la partie droite sont les ligands à champ fort.
On peut conclure que la nature du ligand conditionne la valeur de Do. En plus, la valeur de Do dépend aussi de la nature du cation métallique, de son nombre d'oxydation (Do augmente avec le degré d'oxydation) et aussi de la position du cation dans la colonne (en descendant dans la colonne la valeur de Do augmente).
III. ÉTUDE EXPÉRIMENTALE
Le cation étudié est l'ion cuivrique Cu2+.
III.1 PRINCIPE
L’ion cuivrique Cu2+ possède la structure électronique suivante : 1s2 2s2 2p6 3s2 3p6 3d9.
En solution aqueuse, il donne le complexe octaédrique [Cu(H2O)6]2+ bleu pâle. Il peut donner, avec l’ammoniaque en particulier, d’autres complexes plus stables que le précédent :
NH4OH → NH3 + H2O (dissociation de l'ammoniaque dans l'eau)
[Cu(H2O)6]2+ + nNH3 → [Cu(NH3)n(H2O)6-n]2+ + nH2O
Nous étudierons la variation DE = Do en fonction de la nature du coordinat en remplaçant progressivement les molécules H2O par NH3 dans le complexe [Cu(H2O)6]2+ de couleur bleu pâle.
III.2 MODE OPÉRATOIRE
a. Préparation des solutions
La solution d’ammoniaque a une concentration voisine de la normale :
[NH4OH] = 1 N.
Les solutions diluées seront préparées dans des fioles jaugées de 100 cm3. Préparer par dilution les solutions de concentration 0,20 ; 0,15 ; 0,10 et 0,05 N d’ammoniaque, à partir de la solution concentrée 1 N.
On donne une solution A de nitrate de cuivre 0,05 M. Cette solution contient également du nitrate d’ammonium NH4NO3 à la concentration 5 M. Les ions NH4+ servent de tampon pour la suite de la manipulation, quand on ajoute l’ammoniaque NH4OH pour éviter la précipitation de Cu(OH)2.
Préparer les mélanges suivants (éprouvette) :
SE : 5 cm3 de solution A + 5 cm3 d’eau distillée
S05 : 5 cm3 de solution A + 5 cm3 de solution NH4OH 0,05 N
S10 : 5 cm3 de solution A + 5 cm3 de solution NH4OH 0,10 N
S15 : 5 cm3 de solution A + 5 cm3 de solution NH4OH 0,15 N
S20 : 5 cm3 de solution A + 5 cm3 de solution NH4OH 0,20 N
SN : 5 cm3 de solution A + 5 cm3 de solution NH4OH 1,00 N
On obtient ainsi des solutions bleues dont l’intensité va croissante avec la quantité d’ammoniaque ajouté.
[Cu(H2O)6]2+ + 4 NH3 → [Cu(NH3)4(H2O)2]2+
b. Prise des mesures
Spectrophotomètre (schéma et appareil)
La solution à étudier est mise dans une cuvette dans le porte échantillon (compartiment bleu du spectrophotomètre) avec une autre cuvette contenant de l'eau distillée pour éliminer l'absorbance de l'eau. On règle la longueur d'onde à l'aide du bouton bleu en balayant l’intervalle [400 ; 840] nm par pas de +40 nm.
Noter les valeurs relevées de l'absorbance A (affichées sur l'écran) en fonction de l dans un tableau.
Tracer sur un même graphique les 6 spectres des différents complexes en représentant la variation de l’absorbance A en fonction de la longueur d’onde l (nm).
III.3 RÉSULTATS
Repérer les valeurs des maximas d’absorption pour chaque solution préparée.
À quoi peut-on attribuer la variation des maximas d’absorption constatée ?
À quels complexes [Cu(H2O)6-n(NH3)n]2+ correspondent les différents mélanges réalisés ?
Que remarque-t-on pour le maxima de la solution SN (large excès d’ammoniaque) ? Interpréter.
Calculer Do l'énergie absorbée pour chaque solution en cm-1 puis en eV et en déduire le classement des ligands H2O et NH3 selon leur champ de force.
Données : h = 6,63.10-34 J.s ; c = 3.108 m/s ; 1 eV = 1,6.10-19 J