Sociobiologie: la consolidation des souvenirs traumatisants

Article méritant d'être étoffé (recherches en cours)

Introduction de l'étude

Cette recherche m'a été inspirée par un fait divers subvenu à Montpellier dans une boulangerie. Envahis par des rats, un employé a décidé d'asperger un rat d'essence et d'y mettre le feu. Le but ? Faire fuir tout le groupe qui serrait traumatisé par la souffrance perçue par leur compagnon immolé. Cette déplorable astuce de dératisation a été relayée et presque encouragée pour son efficacité.

Je me suis demandée si cette technique ne tenait pas plutôt de la légende urbaine. Voici donc le résultat de ma petite étude...

Sexe, âge, grégarisme... influencent les réactions anxieuses du rat

Première chose importante à savoir: tous les rats ne sont pas égaux devant les évènements anxiogènes. Les hormones sexuelles joueraient effectivement un rôle sur les réactions et les réponses comportementales aux facteurs de stress.

Le mâle, la femelle adolescente et la femelle adulte ne serraient donc pas égaux, les hormones sexuelles venant compliquer le processus d'anxiété.

De plus, le contexte social a lui aussi son importance: la présence de congénères est sécurisante.

Qu'est-ce que le "Vogel Conflict Test" ?

Le « Vogel Conflict Test » (VCT) est un modèle de conflit mené sur des rats. L'expérience menée par le Dr Vogel consiste en un conflit entre l'évitement d'un stimulus aversif (en l’occurrence un choc électrique reçu en buvant au biberon) et la récompense (le fait d'étancher sa soif après une privation d'eau allant de 18 à 24 heures).

Comment le rat réagit-il à un stimulus aversif ?

Selon Scott et Fuller, l'animal réagit différemment selon l'expérience de l'individu, la soudaineté du stimulus, sa durée et son intensité. L'animal aura tout d'abord une réaction d'alerte: il tentera de fuir ou s'immobilisera complètement ("freezing"). Voyons à présent deux cas de figure: le stimulus avec ou sans renforcement.

Cas de stimulus sans renforcement

Une expérience a été menée sur des jeunes rats soumis à des bruits violents sans conséquences négatives. Leur attitude de départ sera un comportement anxiogène mais l'absence de danger survenu à la suite de ce bruit les mettra petit à petit en confiance, jusqu'à ce que les bruits ne les fassent plus réagir du tout. Si le stimulus inconnu ne présente visiblement pas de danger après plusieurs expositions, l'animal n'aura plus de réaction émotionnelle: c'est ce qu'on appelle l'habituation.

Cas de stimulus avec renforcement

Il s'agit du cas de figure du « Vogel Conflict Test » (lire au-dessus). Les rats buvant au biberon reçoivent un choc électrique. C'est un stimulus aversif. La réponse émotionnelle de l'animal sera d'autant plus systématique que le stimulus se répète régulièrement: réactions de peur, hyperréactivité, anticipation voire même phobie. C'est ce qu'on appelle la sensibilisation.

Cependant, il y a une limite à ce phénomène. Une étude menée en Suède par l'équipe du professeur Thomas Agren a prouvé que le traumatisme dû à un stimulus aversif pouvait être facilement perturbé. Pour cela, il a formé deux groupes soumis à des chocs électriques répétés associés à une image, suscitant ainsi la peur. Cet événement anxiogène s'inscrit dans la mémoire par un processus de consolidation du souvenir. Le premier groupe a été exposé plusieurs fois à l'image 6 heures après, sans choc électrique provoquant une réaction d'alerte. Le second groupe quant à lui a été de nouveau exposé plusieurs fois à l'image sans choc électrique, seulement 10 minutes plus tard. La consolidation du souvenir traumatisant n'a pas eu le temps de se faire dans le cerveau et la peur a disparu.

Ainsi, la répétition du stimulus aversif (l'image) fait diminuer le seuil de réponse de la "victime" (la peur), qui apprends à ne pas répondre aux stimulis qui ne sont pas/plus associés à un renforçateur (le danger). Ce phénomène dépends bien sûr du stimulus (est-il incontrôlable?) et de l'animal (ampleur de l'effet anxiogène du stimulus).

Sources:

"L'anxiété chez les animaux de compagnie: approches conceptuelle, clinique et thérapeutique",

par le Dr Marie Fairon

"The Vogel Punished Drinking Task as a Bioassay of Anxiety-Like Behavior of Mice"

par Alicia A. Walf & Cheryl A. Frye

Science & Vie numéro 1143