Sociobiologie: le comportement sexuel du rat

Le comportement sexuel du mâle rat domestique

L'érection du rat mâle est causée par plusieurs mécanismes: musculaires, et vasculaires notamment. C'est le muscle ischiocaverneux situé sous la surface du périnée qui est responsable de la dorsiflexion du gland du mâle. Cette dorsiflexion serait contributrice de la détection de l'orifice vaginal et du déclenchement de la flexion de la hanche de l'animal amorçant l'intromission.

La course-poursuite suivie de la monte du mâle et la position de lordose de la femelle sembleraient être des comportements interdépendants. En effet, la stimulation causée par la femelle en train de courir aurait un effet excitant (Beach, 1956).

Le rat mâle montre une certaine variété de comportements sexuels. Le chercheur Donald A. Dewsbury a mené en 1966 une étude sur 30 rats Long-Evans (10 mâles et 20 femelles âgés de 90 jours). Il a pu isoler 8 comportements et et 3 périodes successives chez le rat mâle.

Ces 8 comportements sont:

* La poursuite/monte (Pursuit-Mount): tout comportement de poursuite et de monte du mâle envers la femelle.

* Le comportement exploratoire (Locomotor-exploratory Behavior): tout comportement pendant lequel le mâle se déplace dans la cage et explore son environnement.

* Le toilettage génital (Genital Grooming): le mâle repose sur ses hanches et penche la tête vers le bas pour toiletter ses parties génitales.

* Le toilettage "général" (Non-Genital Grooming): tout toilettage n'incluant pas les parties génitales.

* Le reniflage de la femelle (Sniffing Female): occasions pendant lesquelles le mâle approche de la femelle et semble renifler une partie de son corps sans essayer de la monter.

* Le contact "nez-à-nez" (Naso-nasal Contact): mâle et femelle orientent leur nez l'un vers l'autre et semblent frotter leurs museaux l'un contre l'autre.

* L'immobilité (Immobility): absence de mouvement à l'exception de mouvements masticatoires occasionnels.

* Rester coucher (Lying Down): le mâle reste allongé.

Les 3 périodes successives lors d'une série sexuelle sont:

* La latence d'intromission (Intromission Latency): période précédant la première intromission.

* La latence d'éjaculation (Ejaculation Latency): période entre la première intromission et l'éjaculation.

* L'intervalle post-éjaculatoire (Post- Ejaculatory Interval): période entre l'éjaculation et l'intromission suivante.

Voici le tableau présentant l'activité d'un rat mâle lors de saillies selon les 3 périodes de la série sexuelle et les 8 comportements détectés par Dewsbury:

Le comportement sexuel de la rate domestique

La femelle du rat est polyœstrienne à ovulation spontanée, elle n'a donc pas besoin de coït pour ovuler. Ses chaleurs surviennent tous les 5 jours en moyenne, généralement en soirée et pendant 6 à 10 heures.

Les chaleurs de la femelle sont plus ou moins évidentes à détecter en fonction du comportement de l'animal. Elle devient alors plus vive et réactive au toucher: elle peut se mettre en position de lordose (croupe cambrée, postérieur en avant et queue sur le côté) lorsqu'on la stimule sur le postérieur, ses oreilles peuvent aussi vibrer. Sa vulve est ouverte, gonflée et peut prendre une teinte légèrement bleutée.

Il semble que le comportement reproducteur de la femelle puisse s'améliorer en fonction des tentatives effectuées par le mâle. Ainsi, la rate serait plus réceptive si les stimuli sont correctement effectués par le rat (Anderson, 1936. Larsson, Feder et Kamisaruk, 1974). Parmi ces stimuli, il doit en premier lieu y avoir la stimulation des flancs avec les pattes et les avants-bras du mâle, puis la stimulation légère de la croupe et du bas de la queue. Enfin, le périnée est la dernière zone de stimulation, qui est effectuée dans cet ordre précis lors de chaque tentative de saillie du rat (Pfaff et Lewis, 1974). Zarrow et Clark en 1968 ont conclu que la stimulation cervico-vaginale durant le coït était aussi nécessaire à la libération des hormones gonadotropes et faciliterait l'ovulation. L'application correcte de ces stimuli pourrait être nécessaire à la réponse postérieure de la femelle: en l’occurrence le réflexe de lordose rendant la copulation possible.

Notons que la femelle maintiendrait la lordose plus longtemps lorsque les saillies débouchent sur une intromission du mâle que lorsque le mâle échoue à s'introduire (Diakow, 1975). La lordose semblerait aussi être liée au cycle œstral de la rate: son intensité et sa probabilité étant plus élevés durant le pro-œstrus et ses périodes de transition.

Cependant, il est intéressant de constater qu'il existe une relation inverse entre l'intensité de la stimulation vaginale et la latence du refus de la femelle envers le mâle (Gerbrandt, 1951). Les femelles les plus stimulées par le mâle sont celles qui refuseront le plus rapidement l'accouplement. Autrement dit, l'intromission et l'éjaculation du mâle augmente la probabilité de rejet de la part de la femelle. La femelle contrôle le minutage et l'intensité du coït (voir ci-dessous).

L'immobilité est rare chez le rat dans le cadre de comportements non-sexuels. Lors de la saillie, l'immobilité de la femelle semble prédire une éjaculation imminente du mâle.

Pour être gestante, une femelle a besoin de plusieurs éléments en plus de l'évident apport des spermatozoïdes par le mâle. Ainsi, le nombre d'intromissions du pénis ainsi que l'intervalle entre chacune d'entre-elles jouent un rôle dans l'état pro-gestationnel de la rate (Adler, 1978).

L'éjaculat du mâle doit être déposé fermement contre le col de l'utérus de la femelle.

Les recherches de Donald A. Dewsbury sur le comportement de la femelle a permis d'isoler 10 comportements sexuels:

* Le comportement exploratoire (Locomotor-exploratory): tout comportement pendant lequel la femelle se déplace dans la cage et explore son environnement.

* La course (Running): la course est presque exclusivement en réponse à la poursuite du mâle.

* La lordose (Lordosing): la femelle plante ses pattes dans le sol, dresse la tête et le périnée, courbe la colonne vertébrale et déplace sa queue sur le côté.

* La vocalisation (Vocalization): cris poussés par la femelle.

* Le toilettage génital (Genital Grooming): tout toilettage des parties génitales avec la bouche. La femelle déplace son corps sur le côté et se courbe vers ses parties génitales.

* Le toilettage "général" (Non-Genital Grooming): tout toilettage n'incluant pas les parties génitales.

* Le reniflage du mâle (Sniffing male): occasions pendant lesquelles la femelle approche le mâle et renifle une partie de son corps.

* L'assaut (Sparring): adoption d'une position dans laquelle la femelle est orientée vers le mâle, haute sur ses pattes arrières et combat le mâle avec ses pattes avant.

* L'immobilité (Immobility): absence de mouvement à l'exception des mouvements masticatoires occasionnels.

* Rester allongée (Lying Down): la femelle reste allongée.

Nous constatons que les 3 périodes successives lors d'une série sexuelle sont les mêmes que pour le mâle.

Une rate peut-elle être saillie à travers les barreaux de la cage ?

Comme nous l'avons vu, le "rituel" de stimulation de la femelle étant incontournable pour obtenir une réponse reproductive de la part de cette dernière et la dorsiflexion du gland du rat mâle étant nécessaire à l'intromission et à l'étirement de la paroi vaginale, il serait donc à ce titre peu probable qu'une femelle puisse être saillie par un mâle à travers les barreaux d'une cage adaptée aux rats domestiques.

De plus, malgré ce que l'on peut penser, une intromission plus ou moins "accidentelle" du pénis masculin dans l'orifice génital de la femelle ne peut suffire à mener à une gestation. En effet, il existe un "nombre critique" d'intromissions nécessaires pour l'induction de l'hormone pro-gestationnelle ainsi que le transport du sperme (du vagin jusqu'au col de l'utérus puis à l'utérus) nécessaires au maintien d'une gestation réussie (Edmonds, Zoloth et Adler, 1972). Il faut donc que la femelle ait été saillie avec succès un nombre minimal de fois pour mener à une gestation. Un chiffre de 5 intromissions dans un intervalle de 3 à 4 minutes a été suggéré pour l'induction d'hormone pro-gestationnelle chez une jeune rate (les rates plus âgées nécessitant une stimulation plus importante).

Humour: "plan de montage d'une saillie", par Les Voleurs de Miettes

Le comportement sexuel du rat sauvage est-il différent de celui du rat domestique ?

Il semblerait que la femelle ne soit pas aussi souvent en chaleur chez les rats sauvages que chez les rats domestiques. Une expérience effectuée en 1977 ayant pour but d'observer le comportement de la femelle durant le coït sur des rats sauvages et des rats de laboratoire a pu permettre de noter des chaleurs chez la femelle sauvage toutes les 1 à 2 semaines. Il a aussi été observé que les mâles sauvages avaient un taux d'éjaculations moins élevé lors d'une série sexuelle, pour une latence plus importante.

Il est apparu lors de cette expérience que la femelle était aux commandes du coït: lors de la création de couples "mixtes" (sauvage + domestique), les latences des séries sexuelles, mais aussi le nombre d'intromissions et d'éjaculations changeaient en fonction de l'origine de la femelle -sauvage ou domestique- mais ne présentaient pas de différence significative en fonction de l'origine du mâle. C'est bien la femelle, par son comportement, qui contrôle les assauts du mâle et leur régularité. Aucune différence anatomique entre rates sauvages et domestiques n'a été décelée.

De plus, la femelle sauvage en œstrus présente dans 90% des situations un comportement de sollicitation (proceptivité de la femelle): elle s'approche du mâle en faisant des déplacements saccadés contrairement à la démarche rapide et vive qu'une femelle n'étant pas en chaleurs. Elle se place devant le mâle en lui faisant face, si elle se trouve dans un angle arrière oblique à lui, elle lui tournera autour jusqu'à se positionner face à lui. Elle frotte alors sa tête contre la sienne (en rampant sur lui ou en frottant sa tête contre son menton) puis s'enfuit devant lui pour se mettre en lordose dès que le mâle la touche.

Il est envisageable que -plus encore que la simple dichotomie sauvage/domestique- ce soit l'environnement qui soit la clef du comportement sexuel différent du rat sauvage. En effet, il est apparu que mis dans une petite cage, les rats sauvages présentaient une attitude différente avec un nombre d'intromissions avant éjaculation plus élevé et un temps de latence réduit en comparaison des saillies effectuées dans le cadre semi-naturel. Cela peut être dû à l'impossibilité pour la femelle d'effectuer un comportement de sollicitation et un contrôle des coïts correct, à cause du manque d'espace et de l'enfermement causé par la cage.

Sources:

Lordosis Reflex Intensity in Rats in Relation to the Estrous Cycle, Ovariectomy, Estrogen Administration and Mating Behavior

The relationship between levels of exogenous hormones and the display of lordosis by the female rat

Vaginal Stimulation in Rats Induces Prolonged Lordosis Responsiveness and Sexual Receptivity

Role of striated penile muscles in penile reflexes, copulation, and induction of pregnancy in the rat

Somatosensory Determinants of Lordosis in Female Rats: Behavioral Definition of the Estrogen Effect

Effects of coital stimulation upon behavior of the female rat

A quantitative description of the behavior of rats during copulation

The role of the female during copulation in wild and domestic Norway rats (rattus norvegicus)

Penile reflex (Rossler, A.S. et al., 2006)