La littérature d’autrefois, la chanson, le conte, les veillées utilisaient toujours une grande quantité de loups. Bien noirs, bien méchants, bien voraces.
On les a tués. Mais ils se vengent. Le loup est un besoin essentiel. Le loup fut un aliment complet. Il ne peut pas mourir entièrement. Il faut du loup, il faut du frisson noir. Sans le loup on s’ennuierait de la vie. Il faut qu’une ombre sur le mur allonge un museau qui fasse peur. Si ce n’est pas la gueule du loup ce sera la casquette de l’apache avec sa visière inquiétante.
Chassez le loup par la porte, il revient par la fenêtre et se cache derrière les rideaux ;: c’est Rocambole, Chéri Bibi ou Fantômas. En un mot c’est le bandit masqué. Il va dévorer la petite fille. Et c’est ça qui est intéressant. On entendra les os qui craquent. Il ne restera qu’une natte blonde avec un nœud de ruban comme un papillon bleu, sur le plancher passé à l’encaustique.
Quelle attraction, un dimanche ennuyeux, quand le ciel est gris et qu’on ne sait que faire ! On voit par là que le loup ne meurt pas sans avoir pris ses précautions.
Il pond un œuf d’où naît le bandit cosmopolite. Fantômas sort d’un œuf de loup.
(Chronique des loups et des grenouilles de Galvani – La Montagne – 10 décembre 1963)
Un hiver sans loup est comme un samedi sans soleil ou comme un corbeau sans fromage. Il faut des loups à la fin de l’année. Ils font la nuit plus ténébreuse. La Noël en est plus dorée, la messe de minuit plus brillante et le solstice plus mystérieux. L’année nouvelle commence avec une neige plus blanche.
(Chronique des terreurs du solstice – La Montagne – 26 décembre 1961)