343 – Pogoda
W kopercie nieba jest list do nas. Ogromne powietrze w szerokie, pomarańczowe i białe pasy. Idzie przed nami ten łagodny olbrzym : kołysze się. Niesie na drągu błyszczącą kulę.
Zbigniew Herbert
(Beau temps
Dans l’enveloppe du ciel il y a une lettre pour nous. Un air immense à larges rayures, orange et blanches. Ce doux géant marche devant nous : il se balance. Il porte au bout d’une perche une boule brillante.)
344
Verklärte Herbst
Gewaltig endet so das JahrMit goldnem Wein und Frucht der Gärten.Rund schweigen Wälder wunderbachUnd sind des Einsamen Gefährten.
Da sagt der Landmann : Es ist gut.Ihr Abendglocken lang und leiseGebt noch zum Ende frohen MutEin Vogelzug grüBt auf der Reise
Es ist der Liebe milde Zeit. Im Kahn den blauen FluB ninunter Wie schön sich Bild an Bildchen reiht –Das geth in Ruh und Schweigen unter.
Georg Trakl
(Tentative de traduction :
Automne illuminé
L’année s’achève en majestéavec le vin doré et les fruits du verger.Le silence attentif des forêtsaccompagne le promeneur isolé.
Le paysan nous dit : « tout est bien ».Et les douces et suaves cloches du soirConfortent gentiment notre courage.Un vol d’étourneaux nous salue au passage.
C’est la saison si douce aux amoureux.En barque au fil de la rivière bleue,une belle image s’ajoute aux belles images Portant la paix dans son sillage.)
345
Maison de grès sur une hauteurà un talus de la forêtà trois érables des nuages
de l’herbe tout autourfauchée le samediles mois sans r
plantée tout bonnementdans le silenceet le chant des oiseaux
murs comme le bonheuropaques et lumineuxne retenant personne
Roland Reutenauer
346
J’ai souvenir de matins frais,Secoués de rosée.J’étais enfant, ils sentaient bonToute la vie encore à venir.
La lumière y tremblait comme un brin,se lavait dans le proche torrent.
Pierre-Alain Tâche
347
que j’aille par le nordoù s’avancent mes pasou que je reste au sudsaisie par mes penséesque je voyage ailleurssans mémoire imaginantun souvenir dépouilléde distance et de rivageque j’habite les règnesdu rêve ou les empiresde la passion tout seraéquidistant du mêmecentre imprenable
Silvia Baron Supervielle
348
Sois soumis, mon chagrin, puis dans ton coin sois sourd.Tu la voulais la nuit, la voilà, la voici :Un air tout obscurci a chu sur nos faubourgs,Ici portant la paix, là-bas donnant souci.
Tandis qu’un vil magma d’humains, oh, trop banals,Sous l’aiguillon Plaisir, guillotin sans amour,Va puisant son poison aux puants carnavals,Mon chagrin, saisis-moi la main ; là, pour toujours,
Loin d’ici. Vois s’offrir sur un balcon d’oubli,Aux habits pourrissants, nos ans qui sont partis ;Surgir du fond marin un guignon souriant ;
Apollon moribond s’assoupir sous un arc,Puis ainsi qu’un drap noir traînant au clair ponant,Ouïs, Amour, ouïs la Nuit qui sourd du parc.
Georges Perec
349
Et pour dernier office, enfin :
replier seulement ces pages, ces étoffesEt qu’on n’entende plus, né de ce soin,Qu’un froissement, très loin, de l’air.
Philippe Jaccottet
350
A défaut d’enfance il nous resteDes collines qui prennent leur tempsDes ruisseaux qui savent leurs prièresSur le bout des doigtsDes quincailleries prodigieusesOù l’on parle à voix basseEt le pouvoir de ressusciter les mortsD’un seul coup d’œil dans le cellier de la mémoireAlors que la sève doit peinerVingt ans pour faire un chêne digne de foi.
Jean Rousselot