LA LONGUE HISTOIRE DES MONUMENTS ANTIQUES FRANCAIS

INTRODUCTION

Ce travail est motivé par l'étude d'un sujet presque inédit. De l'immense patrimoine bâti par les hommes de l'Antiquité gallo-romaine, il ne reste que des ruines, des "miettes", des "confettis", parfois sauvegardés, souvent ignorés. Est-il possible d'établir des explications à cette disparition massive ? Quel est la part du hasard ? Quel est la part des intentions humaines (pour faire disparaître ou pour protéger) ? Quelles sont ces réutilisations, ses réemplois, ses survivances, qui ont permis à une infime partie de ce patrimoine de parvenir jusqu'à nous ?

Cette étude s'efforce de mobiliser toutes les données disponibles. Les ouvrages de synthèses sur la survivance des monuments archéologiques sont très rares (Pinon 1991). Seules des périodes (Adhémar sur le Moyen Age, Lemerle sur les XVIème et XVIIème siècles…) ou des régions (le Comminges, le Berry…) ont intéressé quelques auteurs.

Il s'agit donc d'une approche inédite, sur la longue durée (quinze siècles environ), s'appuyant sur des sources multiples et très dispersées, au croisement de l'histoire de l'art (l'art roman, la Renaissance, le néo-classicisme ont connu une forte influence antique), de la littérature (des troubadours aux romantiques en passant par les humanistes), des traditions locales (légendes et idées reçues associées à ces vestiges), de l'histoire politique (des souverains les protègent, des grands travaux les malmènent, des guerres les dévastent) et de l'histoire sociale (les actes, terriers, aveux, chartes… les citent fréquemment). L'archéologie complète utilement ces sources textuelles, ce qui permet de dresser un "inventaire" important et insoupçonné de connaissances sur le sujet.

Les chapitres suivants fournissent une trame chronologique de "l'aventure" des monuments gallo-romains à travers près de mille cinq cent ans d'histoire, depuis l'Antiquité tardive jusqu'à nos jours. Tous ces édifices (comme de nombreux châteaux et quelques églises) ont disparu ou ont connu une autre affectation, parce qu'ils ont cessé un jour d'être utiles. Cette évolution sur le long terme permettra de confronter l'éternel dualisme conservation-destruction qui a touché ce patrimoine.

Ce travail doit beaucoup aux patientes relectures et au talent de dessinatrice d' Anne-Marie Marquet. Qu'elle trouve ici l'expression de ma gratitude.