Projet français-histoire pour le niveau 3ème

Madame Anne-Marie Cléret, professeur de français et Madame Audrey Longprés-Raillot, professeur d'histoire-géographie

font travailler leurs élèves de 3ème2 en histoire des arts sur

L'affiche rouge

sous l'angle d'une thématique Littérature engagée - Propagande

L'affiche rouge est une affiche de propagande placardée sur les murs des villes et villages français par l'Etat de Vichy dans le cadre de la condamnation à mort de 23 résistants communistes des FTP-MOI ( Francs-tireurs et partisans - Main-d'oeuvre immigrée) de la région parisienne.

Vingt deux d'entre eux sont exécutés le 21 février 1944, fusillés au Mont-Valérien.

Ces membres de "l'armée du crime" selon le slogan de l'affiche appartiennent au réseau Manouchian. Ce nom vient de l'homme qui dirigeait ce réseau : Missak Manouchian.

L’affiche rouge : Composition, message et réception d’une affiche de propagande sous l’Occupation

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L'étude pluri-disciplinaires porte sur :

  • l'étude de l'histoire de l'affiche et de sa composition dans le cadre du chapitre d'histoire portant sur la Résistance

  • l'étude en français du poème de Louis Aragon et des paroles de ce poème chantées par Léo Férré

L'étude débute en français par le poème de Louis Aragon chanté par Léo Férré :

Ce poème a été rédigé dans le cadre commémoratif de l'anniversaire de la fusillade de ces résistants :

"Strophes pour se souvenir"

Vous n'avez réclamé la gloire ni les larmes

Ni l'orgue ni la prière aux agonisants

Onze ans déjà que cela passe vite onze ans

Vous vous étiez servi simplement de vos armes

La mort n'éblouit pas les yeux des Partisans

Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes

Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants

L'affiche qui semblait une tache de sang

Parce qu'à prononcer vos noms sont difficiles

Y cherchait un effet de peur sur les passants

Nul ne semblait vous voir français de préférence

Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant

Mais à l'heure du couvre-feu des doigts errants

Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA FRANCE

Et les mornes matins en étaient différents

Tout avait la couleur uniforme du givre

À la fin février pour vos derniers moments

Et c'est alors que l'un de vous dit calmement

Bonheur à tous Bonheur à ceux qui vont survivre

Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand

Adieu la peine et le plaisir Adieu les roses

Adieu la vie adieu la lumière et le vent

Marie-toi sois heureuse et pense à moi souvent

Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses

Quand tout sera fini plus tard en Erivan

Un grand soleil d'hiver éclaire la colline

Que la nature est belle et que le coeur me fend

La justice viendra sur nos pas triomphants

Ma Mélinée ô mon amour mon orpheline

Et je te dis de vivre et d'avoir un enfant

Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent

Vingt et trois qui donnaient leur coeur avant le temps

Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant

Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir

Vingt et trois qui criaient la France en s'abattant.

Louis Aragon, Le Roman Inachevé, éd.Gallimard, 1956

L'étude typographique du poème met en lumière des phrases en italique qui correspondent à des citations issues de la lettre d'adieu de Missak Manouchian :

Ma Chère Mélinée,

ma petite orpheline bien-aimée,

Dans quelques heures, je ne serai plus de ce monde. Nous allons être fusillés cet après-midi à 15 heures. Cela m'arrive comme un accident dans ma vie, je n'y crois pas mais pourtant je sais que je ne te verrai plus jamais.

Que puis-je t'écrire ? Tout est confus en moi et bien clair en même temps.

Je m'étais engagé dans l'Armée de Libération en soldat volontaire et je meurs à deux doigts de la Victoire et du but. Bonheur à ceux qui vont nous survivre et goûter la douceur de la Liberté et de la Paix de demain. Je suis sûr que le peuple français et tous les combattants de la Liberté sauront honorer notre mémoire dignement. Au moment de mourir, je proclame que je n'ai aucune haine contre le peuple allemand et contre qui que ce soit, chacun aura ce qu'il méritera comme châtiment et comme récompense.

Le peuple allemand et tous les autres peuples vivront en paix et en fraternité après la guerre qui ne durera plus longtemps. Bonheur à tous... J'ai un regret profond de ne t'avoir pas rendue heureuse, j'aurais bien voulu avoir un enfant de toi, comme tu le voulais toujours. Je te prie donc de te marier après la guerre, sans faute, et d'avoir un enfant pour mon bonheur, et pour accomplir ma dernière volonté, marie-toi avec quelqu'un qui puisse te rendre heureuse. Tous mes biens et toutes mes affaires je les lègue à toi à ta sœur et à mes neveux. Après la guerre tu pourras faire valoir ton droit de pension de guerre en tant que ma femme, car je meurs en soldat régulier de l'armée française de la libération.

Avec l'aide des amis qui voudront bien m'honorer, tu feras éditer mes poèmes et mes écrits qui valent d'être lus. Tu apporteras mes souvenirs si possible à mes parents en Arménie. Je mourrai avec mes 23 camarades tout à l'heure avec le courage et la sérénité d'un homme qui a la conscience bien tranquille, car personnellement, je n'ai fait de mal à personne et si je l'ai fait, je l'ai fait sans haine. Aujourd'hui, il y a du soleil. C'est en regardant le soleil et la belle nature que j'ai tant aimée que je dirai adieu à la vie et à vous tous, ma bien chère femme et mes bien chers amis. Je pardonne à tous ceux qui m'ont fait du mal ou qui ont voulu me faire du mal sauf à celui qui nous a trahis pour racheter sa peau et ceux qui nous ont vendus. Je t'embrasse bien fort ainsi que ta sœur et tous les amis qui me connaissent de loin ou de près, je vous serre tous sur mon cœur. Adieu.

Ton ami, ton camarade, ton mari.

Manouchian Michel