Rencontre avec Agnès Jeannot
"Qu’est-ce que nous réfractons ? Les ailes que nous n’avons pas."
René Char Le Nu perdu
Agnès Jeannot nous accueille dans son atelier de la rue Saint Laurent. Dans les séries qu’elle travaille – peintures grands formats, petits monotypes, gravures - une figure s’impose : un corps majuscule, déformé comme celui d’une vénus hottentote; peint ou gravé en plongée, contreplongée, ce corps est en mouvement, elle le qualifie ainsi :
"Mouvement fugitif inscrit dans un temps impossible à saisir qui suscite une tension émotive libre de toute représentation univoque, ouverte à toutes les déformations. Corps de mémoire, troubles, inachevés, envahissants ou absents."
Corps balancé ou terrassé, à la limite de la chute, matière charnelle aux distorsions affectives, l’œuvre décline les multiples variations d’une présence au monde sans cesse interrogée.
Des gravures œuvres sont présentées à Alter–Art. Les plaques d’aluminium profondément creusées révèlent sur le papier des surprises sans cesse renouvelées où se déploient la puissance du noir et blanc ou la douceur des couleurs, jusqu’à leurs disparitions pour ne laisser place qu’au motif, alors gaufré blanc sur blanc.
"La gravure me permet par l’intensité de la morsure sur le métal, la vivacité de l’incision des lignes et des surfaces et par l’encrage en noir de dévoiler toute la violence des jeux de lumières.. L’encrage en couleurs, lui, permet de jouer infiniment sur les variations de ces différents états d’incarnation."
Devant les gravures viennent se placer des personnages, sculptures de papier comme sorties du cadre, aux couleurs métalliques – couleurs de terre et d’entre-deux.
Ces corps en suspens, fragiles, évoquent de poétiques métamorphoses.
Taille douce sur aluminium, 14,5 x19,5 cm © Agnès Jeannot
Taille douce sur aluminium, 14,5 x19,5 cm © Agnès Jeannot