Par Christophe BUFFET Avocat spécialiste en droit immobilier

Christophe BUFFET Avocat

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Ces articles du Code Civil ont pour objet de permettre le déblocage de l'indivision, lorsqu'un acte qui peut être opportun pour l'indivision (article 815-5) ou lorsque la vente du bien indivis (article 815-5-1) est envisagé.

Voyons successivement ces deux articles.

L'article 815-5 du code civil

Un indivisaire peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d'un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l'intérêt commun.

Le juge ne peut, à la demande d'un nu-propriétaire, ordonner la vente de la pleine propriété d'un bien grevé d'usufruit contre la volonté de l'usufruitier.

L'acte passé dans les conditions fixées par l'autorisation de justice est opposable à l'indivisaire dont le consentement a fait défaut.

Quels sont les actes qui peuvent être autorisés ?

Les actes qui peuvent être autorisés sont variés.

Il peut s'agir par exemple de l'action tendant à la résiliation ou à la résolution d'un bail qui a été consenti sur le bien indivis, et plus généralement de l'autorisation d'engager une action en justice relativement aux biens en indivision. Il peut s'agir également de la vente du bien en indivision, et c'est à vrai dire cette hypothèse qui est la plus fréquente.

Il peut aussi s'agir de la cession de l'exploitation rurale, dès lors que cette cession au profit de l'enfant des indivisaires est la seule façon d'éviter le refus du renouvellement du bail :

"Attendu qu'il résulte des énonciations des juges du fond que M. X..., et Mme Y..., époux communs en biens, étaient titulaires d'un bail à ferme venant à expiration le 30 septembre 1990, après qu'ils eurent tous deux atteint l'âge de la retraite ; qu'un congé avec refus de renouvellement leur ayant été délivré en application de l'article L. 411-64, alinéa 2, du Code rural, Mme Y... a sollicité en justice, l'autorisation de céder, malgré le refus de M. X..., le bail à leur fils, conformément aux dispositions de l'alinéa 6 du même article ; que l'arrêt attaqué (Versailles, 5 avril 1990), intervenu après le prononcé du divorce entre M. X... et Mme Y..., a autorisé la cession du bail litigieux, qui dépendait alors de l'indivision postcommunautaire, en vertu de l'article 815-5 du Code civil ;

Attendu que M. X... reproche à la cour d'appel d'avoir ainsi statué en tenant pour inéluctable la perte du bail par défaut de renouvellement, et en préjugeant ainsi du résultat de l'instance en contestation de congé engagée par lui, de sorte qu'elle aurait privé sa décision de base légale, en ne caractérisant pas l'existence d'une nécessité contraignante, dans l'intérêt commun, de nature à justifier l'autorisation demandée ;

Mais attendu que l'article L. 411-64 du Code rural permet au bailleur de refuser le renouvellement du bail au preneur ayant atteint l'âge de la retraite, tout en réservant à ce dernier la faculté de céder ce bail à un de ses enfants qui peut alors se prévaloir du droit à renouvellement ; que la cour d'appel a constaté que la seule issue ouverte à l'indivision existant entre M. X... et Mme Y... pour que demeure à son actif la valeur patrimoniale de l'exploitation commune, était le transfert de celle-ci au profit de l'enfant des intéressés ; qu'elle en a déduit, par une appréciation souveraine, que le refus de M. X... de souscrire à cette cession de bail, seule alternative possible au refus de renouvellement, mettait en péril l'intérêt commun des indivisaires et qu'il y avait donc lieu d'autoriser Mme Y... à réaliser cette opération, sans le concours de son coïndivis ; que l'arrêt attaqué est donc légalement justifié."

Que recouvre l'intérêt commun mis en péril ?

C'est le tribunal qui va apprécier cette notion d'intérêt commun mis en péril par le refus d'un membre de l'indivision.

Voici un exemple :

"Attendu, selon les énonciations des juges du fond, qu'ayant l'occasion de vendre à des conditions particulièrement avantageuses une parcelle de terrain dont ils étaient copropriétaires par indivis, les consorts X... ont consenti en 1983, conjointement avec les propriétaires d'une parcelle contiguë à inclure dans la même vente une promesse de vente aux futurs acquéreurs ; que, seule au sein de la cohérie X..., Mme Henriette X... a refusé de signer cette promesse de vente et que ses coïndivisaires l'ont assignée, sur le fondement de l'article 815-5 du Code civil, pour être autorisés, en raison de son refus, à passer seuls l'acte de vente ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Angers, 24 juin 1985), considérant que le refus de Mme Henriette X... mettait en péril l'intérêt commun, a donné aux consorts X... l'autorisation sollicitée ;

Attendu que Mme Henriette X... reproche à l'arrêt attaqué d'avoir accordé cette autorisation, alors que celle-ci, selon les énonciations mêmes de l'arrêt, concernait la régularisation d'une promesse de vente antérieurement consentie par des indivisaires qui avaient outrepassé leurs droits et qu'en autorisant une vente qui avait été antérieurement consentie, la cour d'appel aurait violé l'article 815-5 du Code civil ;

Mais attendu qu'il importe peu que la vente projetée par les consorts X... ait été précédée d'une promesse de vente ; que la cour d'appel, qui a estimé souverainement que le refus de Mme Henriette X... mettait en péril l'intérêt commun, a, en donnant l'autorisation sollicitée par les consorts X..., fait une exacte application de l'article 815-5 du Code civil ; que le moyen n'est pas fondé".

Il peut s'agir par exemple de l'urgence à vendre le bien qui est indivision pour acquitter les droits de succession et les pénalités de retard. D'une manière générale il peut s'agir de la nécessité de régler les dettes de l'indivision par le prix de vente qui sera tiré de la vente du bien indivis. Il est également admis que la dette puisse être une dette personnelle à un des membres de la division dès lors que le défaut de paiement de cette dette a pour conséquence d'affecter l'intérêt commun des membres de l'indivision/

L'article 815-5-1 du code civil

Sauf en cas de démembrement de la propriété du bien ou si l'un des indivisaires se trouve dans l'un des cas prévus à l'article 836, l'aliénation d'un bien indivis peut être autorisée par le tribunal de grande instance, à la demande de l'un ou des indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis, suivant les conditions et modalités définies aux alinéas suivants.

Le ou les indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis expriment devant un notaire, à cette majorité, leur intention de procéder à l'aliénation du bien indivis.

Dans le délai d'un mois suivant son recueil, le notaire fait signifier cette intention aux autres indivisaires.

Si l'un ou plusieurs des indivisaires s'opposent à l'aliénation du bien indivis ou ne se manifestent pas dans un délai de trois mois à compter de la signification, le notaire le constate par procès-verbal.

Dans ce cas, le tribunal de grande instance peut autoriser l'aliénation du bien indivis si celle-ci ne porte pas une atteinte excessive aux droits des autres indivisaires.

Cette aliénation s'effectue par licitation. Les sommes qui en sont retirées ne peuvent faire l'objet d'un remploi sauf pour payer les dettes et charges de l'indivision.

L'aliénation effectuée dans les conditions fixées par l'autorisation du tribunal de grande instance est opposable à l'indivisaire dont le consentement a fait défaut, sauf si l'intention d'aliéner le bien du ou des indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis ne lui avait pas été signifiée selon les modalités prévues au troisième alinéa.

"Sauf en cas de démembrement de la propriété du bien ..."

Cela signifie que l'article n'est pas applicable dans le cas où un démembrement de la propriété existe, c'est-à-dire en particulier si un usufruit existe sur le bien indivis.

"... ou si l'un des indivisaires se trouve dans l'un des cas prévus à l'article 836 ..."

L'article 836 du Code civil concerne le cas où un des membres de l'indivision est présumé absent, ou est, par suite d'éloignement hors d'état de manifester sa volonté.

"l'aliénation d'un bien indivis peut être autorisée par le tribunal de grande instance, à la demande de l'un ou des indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis, suivant les conditions et modalités définies aux alinéas suivants"

On voit que cet article, à la différence de l'article précédent, a pour seul objet de permettre l'aliénation du bien indivis ou des droits indivis. Il ne s'agit donc pas de tout acte juridique, mais uniquement de l'aliénation c'est-à-dire de la vente. C'est une différence essentielle avec l'article 815-5 du Code civil.

La condition première est que la règle de majorité énoncée soit respectée.

Dans l'article 815-5 du Code civil, il n'y a pas de règle de majorité, la notion essentielle étant celle du refus d'un des indivisaires mettant en péril l'intérêt commun.

"Le ou les indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis expriment devant un notaire, à cette majorité, leur intention de procéder à l'aliénation du bien indivis.Dans le délai d'un mois suivant son recueil, le notaire fait signifier cette intention aux autres indivisaires."

On note donc l'intervention du notaire et celle d'un huissier qui est chargé de signifier, c'est-à-dire d'informer officiellement par un acte de son ministère l'intention de vendre.

"Si l'un ou plusieurs des indivisaires s'opposent à l'aliénation du bien indivis ou ne se manifestent pas dans un délai de trois mois à compter de la signification, le notaire le constate par procès-verbal. Dans ce cas, le tribunal de grande instance peut autoriser l'aliénation du bien indivis si celle-ci ne porte pas une atteinte excessive aux droits des autres indivisaires."

Le tribunal est donc saisi dès lors que la condition qui viennent d'être énoncées est établie : soit l'un ou plusieurs des indivisaires s'opposent à la vente du bien indivis, soit ils ne manifestent pas leur volonté dans le délai de trois mois à compter de la notification de la volonté de vendre des autres indivisaires.

Le tribunal peut alors autoriser la vente dès lors qu'elle ne porte pas une atteinte excessive au droit des autres indivisaires. On peut utilement rapprocher cette notion d'atteinte excessive de la notion de péril de l'intérêt commun évoquée à l'article 815-5 du Code civil.

"Cette aliénation s'effectue par licitation. Les sommes qui en sont retirées ne peuvent faire l'objet d'un remploi sauf pour payer les dettes et charges de l'indivision. L'aliénation effectuée dans les conditions fixées par l'autorisation du tribunal de grande instance est opposable à l'indivisaire dont le consentement a fait défaut, sauf si l'intention d'aliéner le bien du ou des indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis ne lui avait pas été signifiée selon les modalités prévues au troisième alinéa."

La vente par licitation est une vente aux enchères.

Christophe BUFFET est avocat à Angers